Encore un livre de victime ! dirons-nous. Eh bien, non… Cette fois, la victime se fait juge de ses juges, contre-enquêteur, redresseur, agresseur, destructeur. Pas pour se venger du criminel, mais pour rendre à la machine judiciaire le retour de ses perversions. C’est le livre d’une partie civile qui a décidé de résister et qui a obtenu gain de cause. Au-delà du récit diffus d’un meurtre familial (un homme tue sa femme), ce livre est un recueil de constats, de réflexions et critiques, d’idée neuves sur un système du passé, à lire dans le désordre si l’on veut, mais dont l’ensemble forme bien un tout.
L’histoire de l’enquête est révélée par reproductions de courriers aux autorités, parfois surprenants de franchise, et par extraits de pensées intimes. Le ton d’ensemble peut être émouvant ou cynique, chaque chapitre est indépendant.
Pas de médiatisation pour ce fait divers de province, et pourtant une instruction mouvementée. L’auteur a congédié quatre avocats, fait annuler plusieurs fois le non-lieu demandé par le procureur, essuyé deux plaintes contre lui pour violences, subi la perquisition de sa maison en vue d’intimidations et l’on en passe, pour finalement obtenir à l’arrache un procès d’assises où la police était plus proche de lui que du meurtrier de sa mère. Ce dernier a été condamné, en dépit d’expertises contradictoires et d’un réquisitoire inédit en France où l’avocat général a osé plaider pour la relaxe du prévenu. Il n’y a pas eu d’appel.
L’écriture est limpide, mélange de journal intime, d’essai, d’analyses, de pamphlets caricaturaux que n’apprécieront pas les professionnels du droit ou bien qu’ils feront circuler sous le manteau pour ne s’y reconnaître que trop.